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14 septembre 2019 6 14 /09 /septembre /2019 07:04

Une pièce que Camus admirait, dénonçant la sauvagerie de la répression espagnole : «Il fallait dégoûter à jamais un peuple de la révolution»… On voit bien comment fonctionnent toutes ces dictatures qui avancent masquées ou non, un discours mensonger aux lèvres, la force des armes répressives en bandoulière, ainsi qu’il en va dans la France de Macron par exemple. Venezuela, juillet 1812. Simon Bolivar est en fuite. La répression s’abat, monstrueuse. Montserrat est révolté par les massacres perpétrés contre le peuple. Lui, haut dignitaire de l’état, se refuse à fuir alors qu’on l’en presse dans son entourage. Littéralement, les forces de répression agissent envers les indiens comme s’ils n’étaient que du bétail. Mais la répression veut mettre la main sur Bolivar. Six otages ont été capturés. Leur vie dépend des réponses que Montserrat apportera pour permettre la capture de Bolivar. Dans l’Acte II, Montserrat est seul, confronté aux otages qui le pressent de livrer Bolivar. Il a beau leur expliquer qu’il est de leur côté, bien évidemment, ces derniers ne veulent pas mourir et le somment de livrer Bolivar. A la fin de la scène, les otages veulent le tuer pour se libérer de ce chantage. Izquierdo, l’Inquisiteur, sauve Montserrat et fait exécuter un potier. Puis un marchand, puis un comédien après exigé de lui qu’il joue son propre rôle. Puis une mère de famille. Montserrat est sur le point de céder. L’une des otages, Eléna, l’en interdit. Elle est la vraie héroïne de la pièce, elle, sans nom, sans vie, sans horizon, humble parmi les humbles, femme du peuple, préférant se sacrifier plutôt que de subir la domination abjecte des espagnols. En quoi Montserrat nous concerne ? Camus n’a cessé d’y songer, articulant essentiellement son propos à la figure de Montserrat, dans l’oubli d’Eléna. D’elle, je retiendrai que le désespoir est la certitude du néant et qu’on ne peut lui céder. D’elle, femme du peuple, je retiendrai que la vérité des puissants est honteuse, qui ne sait que bafouer les Droits de l'Homme et mutiler les êtres humains, les éborgner, les estropier. D’elle, je retiendrai que les témoignages irréfutables des victimes sont la force d’un monde autre déjà, le seul digne d’être proclamé humain. Dans la (f)Rance de Macron, aujourd’hui, «il faut dégoûter à jamais le peuple de la révolution», de la justice, de la dignité. Nous sommes précisément dans cet espace de sacrifice et d’otages que Montserrat décrit, où la trahison des élites protège une idée vile de l’homme.

Emmanuel Roblès, Montserrat, Livre de poche n°2570, 158 pages, 5.30 euros, ean : 9782253003533.

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4 février 2019 1 04 /02 /février /2019 09:38

Un invisible, dirait-on aujourd’hui. Tout au bas de l’échelle salariale. Celui qu’on ne regarde pas. Jamais. Dont on ne sait rien. Dont la vie ne compte pas. Acculée dans les replis d’une société fangeuse. D’une société profondément inégalitaire qui ne cesse de mettre en avant le faux mérite des uns, la fortune des autres. D’une société du mépris des petites gens, ces gens « qui ne sont rien » et que l’on croise dans les gares, aux dires du président... Plus même les gens de peu, dont naguère l’on pouvait encore faire la sociologie (Pierre Sansot). Les gens de rien, laissés pour compte d’une république qui patauge dans sa misère politique. Le plus bas des commis donc. Pas vraiment ignare, traversé par les discours de son temps. Au début on s’amuse. L’homme est drôle. Il comprend le langage des chiens. Les seuls peut-être à s’adresser encore à lui. Au loin, à quelques pas mais si loin dans la hiérarchie sociale, son supérieur. Qui ne le voit pas, ne lui parle pas, ne sait sans doute pas qu’il existe, pourvu que ses plumes de bureau soient taillées. Au près, la matrice d’un discours que les hommes tiennent sur eux-mêmes, rabâché ad nauseam par les médias et les gens de pouvoir. Une logorrhée qui imprègne tout et tous. Il n’est même plus la peine d’y croire ou non : la vilenie dégouline et se répand partout, à toute heure du jour et de la nuit. Elle fournit à tous le cadre unique de pensée, les lieux, les trames, les horizons où faire semblant de vivre. Au début on s’amuse, l’homme est drôle, embarqué dans sa folie, ses rationalisations rocambolesques, ses revendications pas vraiment sottes. Et puis la corde se tend. A filer le verbe monstrueux des sociétés occidentales où tout n’est que mensonge, faussetés et mystifications. Pourquoi ne serait-il pas un homme normal ? Pourquoi n’aurait-il pas droit aux rêves qui nous animent ? Pourquoi n’aurait-il pas droit à l’amour, au mariage, à un regard, un avancement, une routine consolante ? Alors notre invisible se rend visible, comme il peut. Son délire, après tout, est son seul levier. Sa seule manière d’être quelque chose, dans un monde qui lui a commandité la peine aberrante de n’être rien. Changer le monde. A son tour, il s’y emploie, avec finalement des moyens adéquats, les seuls qu’il lui reste : sa folie. Au début on s’amuse et puis le personnage bascule dans une souffrance atroce qui vous bouscule et vous broie.  C’est ça, le lieu où le spectacle prend corps : ce moment où d’un coup le sens devient réel, où la souffrance ne s’exhibe plus mais se donne à toucher. Elle est inouïe, là, sur scène, présente dans ces cris que l’acteur pousse, dans cette interprétation ahurissante qu’en donne Eimantas Pakalka, en lithuanien, dans une langue qui ne nous est plus étrangère brusquement, parce que cette folie, nous la comprenons, nue, à quelques pas de nous, dans le vide de ce plateau totalement dépouillé de tous artifices, sinon le dérisoire d’une échelle qui n’a cessé de faire sens. D’un seul coup, Eimantas Pakalka nous saisit, nous retient auprès d’une souffrance dont nous sommes désormais les témoins et dont nous ne pouvons plus cacher que nous la connaissons, parce qu’elle traverse tout le corps social. C’est ce corps social in fine, qui est dévoilé sur la scène. Un corps social martyrisé, le nôtre, où « les gens qui ne sont rien » crèvent sous nos yeux dans le délire d’un monde subi.

Le Journal d’un fou, d’après la nouvelle de Nicolaï Gogol, mis en scène par Oskaras Korsunovas, avec Eimantas Pakalka, les 31 janvier, 1er et 2 février 2019, Théâtre Studio, Alfortville.

https://www.theatre-studio.com/

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12 novembre 2018 1 12 /11 /novembre /2018 12:26

Fin de droits, fin du Droit… Un couple décide d’héberger un SDF. Le dispositif est encadré par l’état, moins dans la perspective d’un retour à l’emploi dudit SDF, que celle de la construction de la justification morale de son exclusion définitive. Un hébergement sous conditions donc, qui peu à peu révèle son vrai visage : une machine à broyer les bons sentiments, les vies, les engagements, une machine à produire du consentement à la domination qui nous accable tous. Donnant / donnant grimacent les officines qui harcèlent notre homme : centres sociaux et pôle emploi. Donnant / donnant, finit par s’indigner le couple hôte. On est pourtant loin de toute logique de réciprocité avec cet homme dont la mort sociale est savamment orchestrée. Loin de toute générosité dans ces liens qui se tissent pour l’enfermer dans l’absence de toute réponse adéquate. C’est qu’il ne s’agit pas de relier, mais de lier. Un lien qui très intelligemment livre cet homme littéralement dé-œuvré, par l’effet du parti pris d’écriture, à la concurrence de la femme de la maison, elle-même attachée au cœur de ce foyer dont elle a fait le lieu de son identité. Même impasse entre les deux positions, quand les enjeux ne se situent plus dans l’économie réelle mais la dimension symbolique. Même impasse où dénoncer l’idéologie de l’assistance caritative que l’on voudrait substituer aux logiques assurantielles et dont l’effet immédiat est d’abolir toute vision politique du social, comme du domestique. Accessoirement, d’élargir les frontières de l’assistanat jusqu’à les rendre incertaines : peu à peu, les services sociaux en charge de notre homme ne savent plus ni quelle attente formuler, ni quelles obligations imposer, tout comme pôle emploi qui s’ingénie à culpabiliser notre chômeur quand l’officine n’a rien à proposer, ou tout comme la famille hôte, qui ne voit aucun mal à exiger de son occupant de menus services en échange de son hospitalité… La réprobation est là, générale, qui affleure sitôt le spectacle commencé. Elle est là d’emblée, parce que notre société gravite désormais autour de son exigence d’une pauvreté acceptable à la condition de demeurer modeste et reconnaissante, d’accepter la fin de ses Droits, politiques, juridiques et sociaux. Fin des Droits de l’homme et du citoyen : ce monde qui s’avance gouverné par le don révèle son enfer, le pauvre croulant sous des «obligations» aussi tyranniques qu’indéfinies.

C’est donc la face obscure du don qui sur scène s’exhibe. L’état a donné pour invisibiliser notre homme, le mari pour tenir son rang. Mais l’un et l’autre don n’a d’autre finalité que d’humilier celui qui le reçoit, d’annihiler sa nature humaine. Don ô combien haïssable en fait ! Don agonistique qui révèle toute l’indignité de cet univers mental dans lequel on voudrait nous faire vivre. Et face à cette indignité, le personnage du SDF recouvre quelque grandeur à demeurer innocent, puis n’être pas dupe et nous donner à penser que seule sa bienveillance est fondatrice, que seule la  fraternité dont notre République a oublié le sens est à même de relier les citoyens entre eux.

Reste donc l’horizon que la pièce pointe : la situation philosophique, politique, de notre société. Qui est précisément celle qu'Agamben décrit avec force dans ses essais Homo Sacer. Celle dont l'absence d'éthique sociale trahit en son sein la présence cachée d'un état d'urgence permanent, où le principe du politique fonde sa justification sur l'exclusion de l'homo sacer, qui peut être tué mais ne peut être sacrifié. Figure centrale de la pensée d'Agamben, cet homo sacer, exclu du Droit, laïc comme sacré, et qui a atteint sa forme la plus achevée dans le camp de concentration nazi où l'espace de l'autorité légale a défait toutes les lois, se présente ainsi comme le paradigme de notre devenir commun.

 

Les pavés de l'Enfer, théâtre Le Local, 18 rue de l'Orillon, 75011 - Paris. Du lundi 12 novembre 2018 au lundi 3 décembre 2018. Séances selon les jours : 17h00, 19h00, 20h00.

Auteur et mise en scène : Sarah Pèpe. Comédiens : Sarah Pèpe, Mayte Perea-Lopez, François Orfanidès, Conrad Leroy, Aurélie Youlia, Morgane Klein.

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16 juin 2018 6 16 /06 /juin /2018 13:45

Elle est là devant nous, apaisée. Elle ne se tient pas devant nous : elle EST là. Non pour faire front, non pour faire face. AVEC nous. Pour partager avec nous ce moment où elle est enfin, en vrai. Comme le disent les petites filles : pour de vrai. Ou peu s’en faut : elle joue. Pour de vrai. Apaisée. Presque. A construire cet «avec» nous. Non pour dire donc, récapituler, mais être là. Ou presque : dans cet infime écart que la représentation impose. Adoptive. Quelque chose comme ça : elle nous a adoptés, plus qu’elle nous demande de l’adopter. Nous, son public, qu’elle s’emploie à saisir puis à défaire pour l’emmener ailleurs. Au travers de ce bout d’image par exemple, qu’elle nous tend, interrompant le cours de la représentation pour nous l’offrir à examiner. «Est-ce qu’on peut aimer une photo au point de se confier à elle ?». Mais elle ne se confie pas. Elle ne témoigne pas. Elle n’est plus ce martyre qu’elle devait être, elle n’est plus à cette place qu’on lui avait assignée. L’atroce est derrière elle, d’une histoire qu’il faut entendre, que nous devons entendre, que nous allons entendre et dont elle nous affranchit à son heure à elle, traversant ses âges passées, de la petite enfance à l’âge adulte –celle qui est devant nous. Une histoire d’adoption, de mère séparée de son enfant, de saccage, que nous allons découvrir –patience-, au gré du texte. Elle, elle est juste ici, maintenant, avec nous. Dans l’assurance de sa performance de comédienne. Avec juste ce qu’il faut d’inquiétude sous le personnage pour être personnellement présente à ce moment infiniment fragile. Dans une interprétation pourtant toute en cordialité. Le visage attendri, lumineux, la diction sûre de son bon droit enfin conquis, et puis les bras jetés soudain par-dessus l’horizon embrassant on ne sait trop quoi, qui, quand il n’y a plus personne à étreindre. Le public ? Trop imaginaire et trop réel en même temps. Quoi donc alors, quand il n’y a plus personne à étreindre ? Sinon cette étreinte pathétique de la représentation théâtrale… C’était son histoire d’ailleurs, ce problème d’étreinte. Enfin, celle de son personnage. Qu’elle anime d’un regard. Accrochant l’un, l’autre de la salle, dans cette proximité audacieuse. Traversant les yeux à la nage… Il y a cette franchise au vrai, non une innocence. La franchise d’une histoire difficile. Douloureuse. Qui déroule son tragique au fil du texte, le retient puis l’abandonne entre nos mains. Là, devant nous, pour qu’il devienne notre histoire dans cet instant magique où le théâtre se fait. Ce que je veux dire, c’est qu’elle est là et que ce n’est pas si aisé, qu’elle nous tient devant elle pour nous amener à être sans elle dans cette histoire, blessée, celle d’Alice. Qu’elle incarne. Celle d’une douleur dont elle s’affranchit (encore). Qu’elle dépose devant nous, entre nos mains. A nous d’en prendre soin. Et dans cette contraction que le théâtre construit, c’est notre propre capacité de résilience qu’elle vient solliciter. Elle, est affranchie. Le trouble est du côté du public. Empoigné. Saisi. C’est son histoire à lui désormais. Le texte est superbe, écrit en dialogues rêches, directs, intègres. Qui se conclut par la mise en scène d’une bande sonore où se fondent les unes dans les autres les voix de sa vie, élémentaires, installées chacune dans sa probité.

L’Affranchie, de et par Pauline Moingeon-Vallès, Librairie l’établi, Alfortville, jeudi 14 juin 2018.

L’Affranchie, une création de la Compagnie ZUT (Zineb Urban Théâtre, Montreuil), mise en scène de Elise Touchon Feirreira, sera donnée au Festival Off d’Avignon du 5 au 29 juillet, à 17h au Laurette Théâtre.

Site web : http://www.compagniezut.fr/

 

L’Affranchie : «Alice Albert a 36 ans. Elle vient de recouvrer la santé et la liberté. Elle a enfin emménagé seule dans un petit appartement où elle a donné rendez-vous à son fils, Nim, qu’elle n’a pas revu depuis leur séparation quand il avait un an.

Inspirée d’une histoire vraie et basée sur des témoignages, L’Affranchie raconte la vie d’une femme qui après n'avoir été que l'ombre d'elle-même, s'éveille de nouveau à la vie et trouve la force d'en savourer chaque instant. Cette force qui habite chacun de nous et nous relie les uns aux autres.»

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15 mars 2018 4 15 /03 /mars /2018 09:38

La librairie l’établi a tiré son nom du livre éponyme de Robert Linhart, véritable chef d’œuvre de la littérature française, L’établi, publié aux éditions de Minuit en 1978. Des années 1967 aux années 1973, de jeunes intellectuels se sont établis en usine, pour marcher à la rencontre d'une classe ouvrière qu'ils idéalisaient, mais ne connaissaient pas. Ils y sont allés armés de l’idée naïve qu’ils constituaient une avant-garde éclairée, seule capable d’organiser le mouvement ouvrier dans son désir de libération. Et du sentiment généreux qu’ils avaient quelque chose à apprendre à son contact. Un paradoxe dont ils revinrent le plus souvent décillés, tel Robert Linhart découvrant que les ouvriers pouvaient parfaitement s’organiser sans lui. De ce mouvement il n’est resté qu’un livre. Celui de Robert Linhart. Moins un témoignage qu’une épreuve féconde. Le livre L’établi, à lui seul, constitue un aboutissement qui a transcendé largement son objet. Peut-être tout écrivain est-il jeté sans le savoir dans ce même mouvement, dont il ne restera à terme qu’un livre, à la rencontre d’un monde qu'il croyait transformer et que son ouvrage a peut-être en effet transformé, là où il n'attendait plus rien...

Peut-être tout comédien est-il jeté sans le savoir dans ce même mouvement, dont il ne restera à terme qu’une lecture… Hier soir, le comédien du studio-théâtre de Vitry, Guillaume Gilliet, nous en a administré la formidable preuve, au travers d’une interprétation tantôt malicieuse, tantôt grave de l’établi. Et ce qui était frappant dans cette lecture, c’était sa capacité à faire ressortir le caractère poignant de l’expérience rapportée par Robert Linhart qui a su, mieux que tout autre, saisir ces conditions d’humiliation faites aux hommes dans les sociétés libérales. C’est jusque dans le détail des vies, au plus intime des gestes qui nous fondent, que Robert Linhart est allé débusquer ce que vivre veut dire, bien au-delà des circonstances historiques ou sociologiques du travail à la chaîne. Hier soir, Guillaume Gilliet nous a littéralement jetés dans cette condition humaine qu’ils sont trop nombreux à considérer comme fâcheuse, préméditant sa lecture pour nous engager, chacun,  à en relever en nous les exigences. Nous ravissant peu à peu, au fil d’un texte souvent ironique dont sa lecture soulignait avec allant le ton moqueur, Guillaume Gilliet nous a offert la chance d’éprouver l’émotion de cette incertitude qui pesa dans l’usine Citroën et que Linhart rapporte au moment de relever la tête, et celle d’éprouver le frémissement libérateur quand la lutte s’énonce, où puiser non seulement la force d’être enfin, mais sa générosité. En une heure de temps, nous avons pu éprouver la mesure d’un monde fait pour broyer les vies et partager la joie de déposer le renoncement auquel nos sociétés nous ont tant réduits, à travers une lecture facétieuse et juste.

Prochaine lecture à la médiathèque de Vitry-sur-Seine.

A suivre : Longueur d’ondes, histoire d’une radio libre,

vendredi 23 mars, samedi 24, dimanche 25 et lundi 26, par la Compagnie Trois-six-trente, direction : Bérangère Vantusso.

En mars 1979 commençaient d'émettre l'une des premières radios libres françaises, autour des luttes dans le bassin sidérurgique de Longwy. C’est cette histoire que la pièce raconte.

contact@studiotheatre.fr

tél 01 46 81 76 50

L’établi, Robert Linhart, éditions de Minuit, poche n°6, 180 pages, 6,50 euros, ean : 9782707303295. Première publication aux éditions de Minuit en 1978.

Librairie L’établi,  8 Rue Jules Cuillerier, 94140 Alfortville

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28 mars 2017 2 28 /03 /mars /2017 08:21

Hier soir, sur la scène des EMA, à Vitry-sur-Seine, Bouziane Bouteldja, en résidence au théâtre Jean Vilar et aux EMA et dans le cadre de la semaine de la danse organisée par la ville de Vitry, à laquelle s’est associée la Briqueterie, a proposé un spectacle proprement ahurissant, mélangeant hip-hop et danse classique avec ses élèves de la section danse du lycée Citroën de Paris et ceux du conservatoire de danse classique des EMA de Vitry, avant de clore la session par un solo d’une puissance souveraine : Réversible. La colère, tel était le thème autour duquel ses élèves avaient travaillé. Imaginez alors cette colère essaimant sous la chorégraphie d’ordinaire évanescente de la danse classique ! Colère rentrée pour les uns, froide, explosive pour les autres, en discrétion, en disruption en irruption, interprétée avec une élégance et une force inattendue par ces jeunes danseurs, démultipliée bientôt par la violence festive du hip-hop avant de brûler, littéralement, dans ce corps à corps effarant proposé par Bouziane. Déchirement, exaspération, supplique d’un corps bardé d’interdits par les religions révélées, s’arrachant, tel celui des esclaves de Michel Ange, chair à chair, aux entraves qui le brident. Corps meurtri, gommé, esseulé, ancré à des tonnes de pesanteurs, affecté, re-ligere (ce relié des religions qui n’embrasse aujourd’hui aucun sublime dirait-on) –mais pour le pire… Corps défait qu’il recommençait sans cesse, là, sous nos yeux, s’arrachant à lui-même, à son double incarcéré, à cette matrice inconvenante et obscène de l’égarement dans lequel les religions sont tombées. Corps furieux, aimant sinon aimé de nuées incapables d’apporter la paix sur la terre. Corps en déséquilibre constant, cherchant comme une proie son équilibre avant d’exploser en figure foudroyante. Quel spectacle, quelle puissance, quelle leçon !

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